BACKSTAGE : Les Secrètes Sessions pour les 30 ans de Court-Circuit @ CCNamur (01, 02 et 03/02/23)

Ça faisait un moment que je voulais vous en parler, mais l’émotion était telle qu’il m’a fallu du temps pour revenir de cette expérience. Bon, là, ça fait 3 mois et demi, je crois que c’est bon…

Prenez une brochette de musiciens de tous styles, jouant de divers instruments, ne se connaissant pas ou que peu, enfermez les dans un centre culturel, secouez, et vous aurez du bon jus de musique bien frais, pulpe incluse !

Le concept n’est pas nouveau, on sait, et c’est d’ailleurs avec l’équipe des Secrètes Sessions, originaire de France, et Franco Faune, leurs plus fervents représentants en Belgique que toute cette fine équipe a investi le Centre Culturel de Namur, aux abattoirs de Bomel.

Pour ses 30 ans, Court-Circuit a invité des anciens participants et vainqueurs des éditions passées du Concours-Circuit. On y retrouvait Pierre et Nathan de Endless Dive, Antoine et Martin de Glass Museum (notez que Pierre de Endless et Martin jouent aussi dans Guilt), Sophie Ciaramonte de Soror, Barbara (ou plutôt Benni) Renaud de Alaska Gold Rush, Sam de Tukan, Loïc de Endz (et de Flexa Lyndo), Nico de Twin Toes, une certaine Elena d’un groupe nommé Eosine, Lionel Soveigh, Elisabetta Spada, Mia Lena, Junior de Saudade, Pablo de Slamino (et de chez Court-Circuit) et avec la nouvelle génération, une bande de vieux qui en ont toujours sous la pédale (d’effet) : Gil de Joy As A Toy, Jerôme de Quiet, Phil Henrion de Blue Velvet, Florent Leduc (Mr Franco Faune), et … Monsieur le Directeur, David Dehard (Eh oui, lui aussi a participé à ce qui deviendra plus tard le Concours-Circuit).
Si j’en ai oublié l’un ou l’autre, ce n’est que sous l’effet de l’émotion…

Ça en fait des noms, c’était chiant à lire, mais je peux pas m’empêcher de saluer ces gens incroyables. Pourquoi « incroyables » ? Lisez la suite.

3 jours hors du temps

2 jours de créa et d’enregistrement, et un jour pour répéter tous les morceaux pour un live en fin de journée. Voilà le programme.

Tout est prêt. Dans divers locaux aux noms évocateurs tels que « boyauserie », « nettoyage de boyaux », « hall abat gros et petit bétail », « frigo 2 » ou encore « abat des porcs 1 », on retrouve quelques amplis, des percus, un piano, et encore d’autres bazars. Y’a plus qu’à…

Après un mot de bienvenue, une courte explication du fonctionnement, et un petit déjeuner avalé à la hâte, on voit déjà des petits groupes qui se forment, au gré des connaissances, mais surtout, au gré de l’envie de faire quelque chose avec un.e tel.le. Oui, je sais, j’ai utilisé le point médian dans un article du Deadbeat Club. Ça parait fou comme ça, vu d’où vous êtes, mais il est primordial que vous saisissiez toute l’ampleur de ce qui se déroulait là, sous mes yeux. Le point médian, c’est une ouverture vers plus d’inclusivité, plus d’ouverture, plus d’acceptation de l’autre, mais aussi de soi, de ses errances, de l’inconnu qui sommeille en nous. Oui, je sais j’en fais trop, mais c’est bien là tout l’intérêt de la chose. Pour trouver les mots justes, les mots qui expriment toute l’intensité du moment, sachez que je vais user de superlatifs, que, comme d’habitude, je vais exagérer, et que la caricature va rythmer ce récit tel un exutoire de mon admiration.

Trois jours durant, je fus le témoin privilégié d’une union collective et éphémère de laquelle jaillit un océan de musique.

Trois jours de partage inconditionnel, trois jours d’ouverture, trois jours d’acceptation, trois jours où, et c’est incroyablement rare, des artistes ont accepté que d’autres viennent mettre leur nez dans leur casseroles. Ils ont accepté que d’autres, des personnes, qui ne sont même pas dans leurs têtes, altèrent leur magie. Qu’ils dénaturent leur œuvre.
Ça a l’air de rien, comme ça, pour des bouseux comme nous (enfin, comme toi, mais je me suis inclus dedans pour ne pas trop te vexer, et paraitre insultant), mais t’as déjà demandé à un chef cuistot de mettre du sel ou même de lui donner le moindre conseil en cuisine ? Non ? T’as une idée, quand-même de ce qui va se passer ! Tu sais très bien que tu vas, dans le meilleur des cas, te faire foutre dehors à coup de pompes dans le cul.

Pour la petite anecdote, les horaires de ma mission n’avaient pas été clairement définis (par moi sans doute), et si dans mon esprit, j’allais rentrer peinard le soir vers 17h, j’imaginais, un peu naïvement que les artistes étaient de toutes façons des branleurs au chômage (je déconne, on peut très bien être un branleur sans être au chômage, regarde-toi, bon sang !). Bon, j’ai vite compris que je me fourvoyais avec une force peu croyable quand David-de-chez-Court-Circuit-d’en-face (blague locale) m’a demandé si je venais « à l’after, rendez-vous à 23h, mais je peux pas encore te dire où c’est , c’est un endroit secret ». Rassurez-vous, je ne vais pas vous faire le récit de cette soirée mémorable qui inclut un bar clandestin, un pote de classe que je n’avais plus revu depuis presque 20 ans, et une quantité non-négligeable d’Orvaux.
Long story short, j’ai été acheter des t-shirts propres, des chaussettes, et j’ai dormi à Namur pendant 2 nuits.

Un mot : ADAPTATION

Du partage, donc. Des échanges. Du mélange. De l’ouverture. De la découverte. À tous les étages. Comme on pouvait s’en douter, des groupes se forment au gré des affinités musicales, des rapprochements s’opèrent selon les styles musicaux similaires, ou proches, selon les univers musicaux qui se rencontrent, voire s’entrechoquent et se collisionnent. Mais pas que. Il y a aussi une réelle volonté de faire « autre chose ». Parfois de se mettre en danger. Que ce soit dans des style musicaux inconnus, ou dans lesquels ils aimeraient, mais n’ont jamais osé jouer, ou encore en jouant d’un autre instrument que son instrument de prédilection, les sentiers ne sont pas toujours tracés. La chose la plus remarquable, celle qui m’a sauté aux yeux était la faculté d’adaptation dont ces gens sont capables.

« On va partir sur une base d’accord Sol mineur en Ré diminué ». Ou un truc comme ça. Je sais même pas si j’ai bien compris ni si ça existe vraiment. Toujours est-il que les autres ont enchaîné et Lionel avait l’air content. En tous cas, le ton était donné. Faire de la musique, OK, mais alors, avec classe et distinction. La musique, c’est pas un sport de nazes. Par ces quelques mots, il a juste claqué au sol toute mon aspiration à attraper une guitare et faire semblant de jouer pour me souvenir de mes jeunes années folles. Ces années où je jouais déjà suffisamment mal pour comprendre par moi-même que devais trouver un autre moyen de subsistance si je voulais manger à ma faim. Même manger, déjà, c’était pas mal comme postulat de départ.

Des génies donc… plein de génies. Ensemble. Qui font des trucs plus fous les uns que les autres. Si les styles musicaux des morceaux créés sont riches et variés, on retrouve immanquablement la couleur de Alaska Gold Rush, de Eosine, de Glass Museum, de Mia Lena, de Endless Dive, et de tous les autres. Un peu comme si, malgré eux, ils déteignaient sur les autres. Et comme toutes les couleurs qui déteignent, si elles teintent les autres couleurs, elles sont elles-aussi altérées par les autres couleurs.

Et pour ne pas laisser tomber tout ça dans l’oubli, la salle principale du Centre Culturel s’était muée pour l’occasion en un modeste, mais néanmoins parfait studio d’enregistrement live. Le tout agrémenté de quelques lights, et hop ! il n’en fallait pas moins pour l’équipe des Secrètes Sessions d’enregistrer les performance de ces groupes de l’instant et d’en faire une captation vidéo. Le tout étant monté dans la foulée dans le sous-sol namurois. Un travail de malades !

Est-ce que je vais m’étendre sur la liste des morceaux créés ? De toutes façons, vous savez que je vais vous mettre un lien YouTube vers la playlist des captations. Et des photos. Plein de photos. Mais toujours est-il que je vais poser ma petite mention spéciale sur « Alors on Doom », reprise… en doom… de … Stromae (incroyable tuerie), le math-rock de Myagi San (morceau foufou), la fin grave post-rock de JVTG, et le kraut-rock scandé en italien de la Culpa de Cane

Le 3ème soir, après une journée de répétitions et d’ajustements, toutes les créas étaient jouées en live lors d’un concert gratuit.

C’était dingue. Est-ce que j’en dirai plus ? Non. Vous n’avez qu’à aller voir par vous même… scrutez les internets et guettez les prochaines Secrètes Sessions ! En attendant, vous pouvez aller faire un tour sur le Bandcamp ou la chaîne YouTube des Secrètes Sessions, et il y a aussi quelques playlists sur les Secrètes sur la chaîne YouTube de Francofaune. Y’a aussi toutes les pages Facebook habituelles ici, et et où vous pourrez trouver encore plus de choses que les Secrètes Sessions.

Et après ? Sachez que les petits ruisseaux font les grandes rivières. Est-ce qu’on réentendra un jour un des groupes formés pour l’occasion ? Si j’étais vous, je garderais une oreille tendue.

Ces 3 jours furent riche en émotions, en rencontres, en échanges. Ce furent 3 jours d’une aventure immersive que je n’oublierai jamais. Merci les Secrètes Sessions ! Merci Franco Faune ! Et surtout, merci Court-Circuit !